#MercrediFiction #2.3

Arrivés dans l’appartement, Lucie fit vite fait le tour, prit le nécessaire pour Groucha et le sortit doucement de la voiture. Il se réveilla en sursaut.

– Doucement Groucha, doucement… viens, on va manger et boire un coup.

Elle installa une litière, lui mit quelques croquettes et de l’eau. Le pauvre chat a bu toute sa gamelle. Les croquettes ont l’air de lui plaire, c’est déjà ça.

– Il avait soif dis donc !
– Oui… j’aurais dû lui en donner plus tôt…
– On pouvait pas… on trouvera un moyen pour qu’il en ait toujours un peu dans la voiture.

Lucie proposa d’ouvrir une conserve… mais personne n’avait faim à part Groucha. Elle sortit le rhum brun et s’enfonça dans le canapé. Victor ramena deux verres et se mit à côté d’elle.
Elle zieutait son téléphone.

– Je comprends pas… personne n’en parle… c’est comme si le pays n’existait pas. Anglais, français et même allemand, ça ne donne rien.
– C’est dingue ça… Et si on était censé mourir ? Je veux dire… ils avaient peut être prévu de détruire le pays et la mémoire des gens… la frappe était précise, ils voulaient éliminer les travailleurs.
– Mais pourquoi ? Et leur famille ?
– Et bien… visiblement aussi, si on regarde tout l’Est de la France a été touché, l’Allemagne également, la Belgique aussi… et le Luxembourg… entièrement démoli.
– Tu crois que nos parents…
– Oui… je crois que oui. C’est un miracle que tu aies retrouvé Groucha.
– Oui… Ils vont nous rechercher si c’est ça.
– On trouvera une autre voiture demain.
– Et s’ils nous retrouvent ?
– Si ça se trouve ils ne nous cherchent même pas… on ne sait même pas qui sont “ils”…

La chance qu’elle avait, c’est que sa tête fonctionnait de façon particulière par rapport à un humain. Elle savait comment contourner les choses. Toujours. Il suffisait de lui donner un jouet et elle en construisait un autre. Pour elle, c’était une malédiction… toujours incapable de comprendre ce que les autres veulent d’elle. Déjà petite, à l’école, les exercices les plus simples n’étaient pas faits correctement, juste parce que, pour elle, ça n’avait pas de sens, juste parce qu’elle voyait trop loin, comme lui disaient ses professeurs.

– Bon, on va voir comment ça se passe demain, si ça se passe mal, on se fait discret et on trouve des papiers d’identité. Si ça se tasse on voit où on bouge.
– Sage décision… même si je ne comprends vraiment pas à quoi tu penses… des fois j’aimerais bien faire un “man Lucie” dans un term…
– C’est bien pour ça que les hommes ne comprendront jamais les femmes…
– C’est à dire ?
– Bah… quand tu fais un “man man” ça marche… un “man woman” ça n’existe pas.
– T’es con !
– Ouais je sais.

Lucie souriait, ça lui faisait du bien de sourire un peu, Victor le savait bien. Ils continuaient à boire et tentaient de refaire le monde avec des “si” avec Groucha qui s’endormait sur les genoux de sa maîtresse en ronronnant.
Et si les gens apprenaient juste à voir le beau où il était ? S’ils arrêtaient de se prendre la tête sur des choses qui n’ont pas de sens ? Si, pour une fois, ils n’agissaient pas comme des êtres individualistes et égoïstes ? Si…

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hackorn
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Un peu magique, un peu trash, un peu tout, surtout rien.

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