#MercrediFiction #1
Il y a une trentaine d’années, les humains travaillaient en échange de ce qu’ils appelaient un salaire. C’était un peu comme les bons d’aujourd’hui, mais en papier ou en pseudo métal. Chaque pays avait les siens. Personne ne se souvient vraiment comment les pays faisaient pour échanger avant l’invention des bons universels.
Chaque personne se doit d’accomplir des actes pour la communauté. En échange il reçoit des bons… et c’est comme ça que tout commença…
Alors qu’il faisait la queue, elle l’observait de loin, discrète, comme une petite souris. La dame de l’accueil voulait expédier les gens au plus vite. C’était l’heure de sa pause. Il passa, triste, prit un papier et partit. Lorsqu’il quitta la file, il lui sourit. Elle lui rendit son sourire, un peu gênée. Il n’avait rien obtenu pour ses enfants. “Les temps sont durs” qu’elle disait sans cesse, cette dame. Puis la jeune femme s’avança. Elle eût droit à 4 bons cette semaine.
4 bons… C’était bien trop pour elle. Elle avait certes bien travaillé mais… Les autres alors ? Elle prit ses bons et sortit. Elle croisa le monsieur de la file. Les larmes aux yeux.
– Tiens, moi j’en ai pas besoin, il me reste ceux de la semaine dernière.
– Mais…
– Vraiment, tiens. Elle lui tendit ses bons.
– Il existe encore de la bonté dans ce monde, merci.
Elle s’éloigna, seule, contente de savoir que des gamins mangeront un peu cette semaine.
Elle… elle n’était pas grand chose et ne savait pas faire grand chose de ses dix doigts, mais il suffisait qu’elle soit derrière un clavier pour faire des miracles. Ces actions, pourtant simples et rapides, rapportaient beaucoup de bons. Alors que les autres (tondre les pelouses, réparer les engins, aider les plus faibles etc…) ne rapportaient plus rien. Trop de monde les faisait. Elle, Lucie, avait grandi avec un clavier dans les mains. Elle trouvait ça tellement injuste… L’homme à qui elle donna ses bons avait tondu 3 pelouses et aidé 6 personnes. En une seule semaine. Il avait recueilli des enfants en bas âge et n’avait pas de quoi les nourrir. “Il veut simplement des bons gratuits” que les gens disaient. Lucie savait bien que c’était faux. Et elle gagnait tellement de bons avec ses tâches qu’elle en distribuait toujours un peu. Elle était contente que les gens s’entraident lorsqu’elle était petite. Elle pensait qu’ils le faisaient naturellement. Mais rien n’était gratuit et finalement, en grandissant, elle comprit bien vite que chaque action entrainait un bon. Le souci c’est que comme tout le monde s’est mis à aider son prochain, le gouvernement acta cette action comme normale et saine et a donc retiré les bons pour cette action. Comme pour d’autres. Les gens devaient pourtant se nourrir, mais ils ne savaient plus quoi faire pour gagner ne serait-ce qu’un petit bon.
Elle se dit que finalement, faire une action et obtenir toujours la même somme était peut être pas un mal finalement, que c’était mieux avant, et qu’elle aurait aimé vivre à cette époque.
Elle rentra dans sa petite maison, s’installa sur son fauteuil, prit sa liseuse et commença à lire son livre préféré…
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